Après douze années en tant que cadre dans la grande distribution, Claire s’effondre un matin de novembre. Burn-out. Elle finit à l’hôpital et découvre qu’elle souffre d’une dépression sévère. Aidée par l’art-thérapie, la sophrologie, la psychothérapie, le yoga durant son hospitalisation d’un an, elle finit par se (re)trouver. Aujourd’hui, elle exerce son activité de psychopraticienne et de sophrologue caycédienne dans la “Yourte des saison” au fond de son jardin.
Quel a été ton point de départ ? Ton déclic ?
Cette année d’hospitalisation a été très difficile sur le moment mais avec le recul c’est le plus beau cadeau que la vie ait pu me faire. D’abord parce que c’était la première fois où j’ai pu faire une pause et prendre soin de moi. Mais ensuite parce que cela m’a donné l’occasion de trouver ma vocation.
À la fin de mon séjour, j’ai commencé à réfléchir à ce que je voulais faire de ma vie. Bien entendu, le travail en entreprise n’était plus une option pour moi. Je me suis alors souvenue qu’étant petite, je voulais être psychologue. Puis au fil des séances de sophrologie, quand j’ai pu en constater les bienfaits, je me suis rendue compte de la beauté de cette discipline. Notamment parce qu’elle travaille sur le comment et non le pourquoi. Elle cherche à renforcer le positif. Tandis qu’en psychothérapie, on va plutôt travailler sur les blessures et l’enfant intérieur. Finalement, le pourquoi et le comment sont très complémentaires. D’ailleurs, je l’ai bien vu durant mon hospitalisation où j’ai pu bénéficier de ces deux types d’accompagnement. C’est pourquoi, j’ai décidé de me former aux deux.
J’ai donc suivi une formation cerfpa de psychologie de l’inconscient et des profondeurs et de sophrologie caycédienne, qui m’a beaucoup appris, pendant quatre ans. Puis j’ai commencé mon activité en mai 2020 à la sortie du confinement.
Qu’est-ce que la sophrologie caycédienne ?
La sophrologie caycédienne est avant tout une relaxation. On inspire, on expire, on peut faire des étirements, des marches et adopter différentes postures. Ce n’est pas forcément une discipline statique. Mais on va au-delà de la simple relaxation car après la partie “exercices“, la personne écrit ce qu’on appelle une phénodescription. C’est-à-dire qu’elle décrit ce qu’elle a ressenti ou ce qu’elle ressent. Après ce moment d’écriture, il y a un échange et c’est là que se trouve la valeur ajoutée de la sophrologie caycédienne. Car sans aller dans le pourquoi, on cherche à comprendre comment la détente s’installe. Au fur et à mesure des séances, on accompagne la personne dans la prise de conscience de valeurs, de capacités, d’estime de soi et de respect.
Grâce à ce travail, la personne apprend à se percevoir avec plus de douceur, plus de recul ainsi que le monde qui l’entoure. Au lieu de souffrir de certaines situations ou interactions, elle sera davantage dans la contemplation.
Comment se passe une séance ? Comment allies-tu la sophrologie et la psychothérapie ?
Lors de la première séance, on fait une anamnèse qui me permet d’identifier les besoins et les attentes. Puis, avec la personne que j’accompagne, on oriente soit uniquement vers la sophrologie soit vers les deux. Dans le deuxième cas, je me concentre essentiellement sur la psychothérapie. C’est-à-dire que l’on va regarder l’enfant intérieur, les traumatismes et les émotions. Ensuite, comme la séance dure généralement une heure et demie, je propose de finir par de la sophrologie. Car une fois que les mots sont posés, il est intéressant de renforcer la détente dans le corps et l’esprit.
Le déroulement de la séance dépend non seulement des besoins de la personne mais aussi de comment les choses se présentent. Je fonctionne énormément à l’intuition. Donc parfois je propose un voyage au tambour et d’autre fois, un soin avec des pierres et/ou des huiles.
Ce que je cherche à faire au fil des séances, c’est inscrire la bienveillance dans le corps et l’âme de la personne. Lui apprendre à prendre du temps pour elle, à ne pas se juger lorsqu’elle ressent une émotion forte telle que la colère ou la tristesse.
En ce qui concerne la durée de l’accompagnement, elle varie d’une personne à l’autre. Certaines viennent seulement deux ou trois fois alors que d’autres sont là depuis presque deux ans. Après, il y a des personnes qui ont besoin de temps pour intégrer ce qu’elles ont découvert ou appris pendant la séance. Ou alors elles vont mieux pendant un moment et décident de revenir car elles en ressentent le besoin.
Pourquoi exercer dans une yourte ? Pourquoi la “ Yourte des Saisons “ ?
L’idée de la yourte m’est venue un matin de pleine lune. Rien d’étonnant parce que je suis très reliée à la pleine lune, c’est le moment où je suis la plus créative et intuitive. Néanmoins quand j’ai eu cette idée, je suis restée un peu perplexe. Pourquoi une yourte alors que je n’y avais jamais passé une seule nuit ?
Mais en y réfléchissant un peu plus, je me suis rendue compte que j’avais du mal à me projeter dans un cabinet de ville. Notamment parce que j’avais envie d’animer des cercles de femmes, d’être dans une dimension plus spirituelle et surtout de garder une certaine liberté. Or louer un local ou le partager avec d’autres personnes est assez contraignant. Sans oublier l’aspect financier du cabinet en ville. Alors que la yourte correspond plus à mon âme. Elle me permet d’être chez moi, près de mes animaux et de ma famille.
Heureusement, j’ai eu la chance d’être soutenue financièrement par mes parents et mes grands-parents. Car après mon burn-out et mes formations, j’étais plutôt sur la paille. Donc je suis pleine de reconnaissance pour cette aide. J’estime être chanceuse. Même si mon mari trouve que je le mérite car je me suis battue pour sortir de la dépression. Selon lui, j’ai su écouter ce que la vie me disait alors que tout le monde n’y arrive pas.
Pour le nom, j’ai choisi la ” Yourte des saisons ” en référence à l’œuvre de Vivaldi. En fait, c’est une musique qui me transporte et qui m’a accompagnée tout au long de ma guérison. D’ailleurs, je me suis même fait tatouer ce nom sur le bras. Et puis quand on s’intéresse à la médecine chinoise, on se rend compte que chaque saison a un enseignement à nous donner. Par exemple, l’hiver nous invite à ralentir, à se reposer pour pouvoir fleurir au printemps.
Le féminin sacré tient une place importante dans ta vie ? Par quoi cela se traduit-il au quotidien ?
Selon moi, en tant que femme, on vit sur le rythme des quatre saisons à chaque cycle. On se sent fatiguée et il est temps de ralentir. Puis l’énergie revient et on se sent ressourcée et intuitive. C’est important de prendre conscience de ce rythme afin de retrouver son pouvoir et sa puissance.
Personnellement, je suis très à l’écoute de mon rythme. Je suis dans la contemplation, je prends le temps d’écouter les bruits qui m’entourent, d’observer la nature et d’écrire mes émotions. J’essaye aussi de garder des moments de pause, de silence en m’octroyant par exemple un week-end de retraite où je pars seule. Et puis tous les mois je participe à des cercles de femmes.
Finalement j’essaye d’être la plus libre possible au quotidien, toujours sans jugement.
Qu’est-ce-que ce travail t’apporte au quotidien ? Comment tu te sens ?
Alignée ! Ce travail fait sens pour moi. J’aime beaucoup la partie théorique et tout ce que j’ai appris durant mes formations. Mais ce que trouve fort, c’est toute cette intuition dans ma pratique. Mon inconscient est très connecté et souvent des choses m’apparaissent. Pas mal de personnes, que j’accompagne, me disent que j’ai souvent le bon mot ou la bonne question. Bien sûr, il y a des moments où je ne suis pas sur le bon chemin. C’est pourquoi je demande toujours si la personne est d’accord avec ce que je lui dis. Je ne suis pas une gourou et je ne vais pas interpréter à mauvais escient. Mon but est d’aider la personne à ouvrir des portes.
Quel est le regard des autres par rapport à ce projet ?
Alors au niveau de mes amis plutôt génial. En revanche, au début, mes parents et mes beaux-parents étaient complètement perplexes. Je me souviens d’avoir parlé de mon projet de yourte à l’occasion de la fête des mères et je m’en suis pris plein la poire. À l’époque, le regard et les remarques des autres me tenaient encore un peu à cœur donc j’ai laissé ce projet quelque temps de côté. Puis je me suis rendue compte que c’était mon rêve, ma vie et que si je voulais le faire, je le ferais. D’ailleurs, j’ai bien fait d’y croire puisque ma famille m’a finalement aidée.
La moralité de cette histoire est qu’il faut accorder de la valeur à notre intuition et à nos ressentis. D’ailleurs je sensibilise beaucoup mon fils à sa valeur et à son estime de soi.
Est-ce que tu as des modèles ? Des sources d’inspiration ?
Depuis l’adolescence, le bouddhisme m’inspire beaucoup. Sinon je dirais Jung, le psychiatre qui a créé cette notion de psychologie des profondeurs. Mais aussi de plus en plus le chamanisme amérindien et cette connexion profonde à la nature et aux animaux.
Et la suite c’est quoi ? Est-ce que tu as des projets pro ? Des projets persos ?
J’aimerais bien avoir une roulotte où je pourrais venir me ressourcer, peindre et lire. Sinon j’entame bientôt un programme de dix rencontres autour de la reliance au féminin sacré et au chamanisme amérindien.
Et d’ici quelques temps, pourquoi pas m’aventurer hors de ma yourte. Travailler dans d’autres lieux avec un public différent comme les personnes âgées par exemple.
Si tu jetais une bouteille à la mer, quel message te laisserais-tu pour ton toi futur ou pour les prochaines générations ?
Je dirais de prendre conscience de notre pouvoir intérieur. De se rappeler que l’on est important.e, que l’on a de la valeur et que l’on vient sur Terre pour vivre sa propre existence.